Les incivilités en entreprise ne cessent d’augmenter, selon les derniers chiffres publiés par le Défenseur des droits. Pourtant, la majorité des managers de proximité n’a reçu aucune formation spécifique pour y faire face. D’après l’INRS, les conséquences sur la santé psychologique des équipes sont encore sous-estimées par les directions.
Les dispositifs d’accompagnement restent minoritaires, malgré la demande croissante des agents publics et salariés du secteur privé. La prévention se heurte à des obstacles organisationnels, tandis que les solutions sur le terrain peinent à s’imposer durablement.
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Incivilités en entreprise : comprendre un phénomène aux multiples visages
Le climat social se détériore souvent là où l’on s’attendait à la cohésion. Les incivilités s’installent progressivement, à bas bruit, dans la vie ordinaire des salariés. Une remarque sèche, un refus de saluer au détour d’un couloir, un mail dont le ton agace. Rien d’exceptionnel, mais chaque écart s’ajoute au précédent. Les baromètres sur le climat social sont clairs : les micro-conflits sont de plus en plus fréquents, tout comme la nervosité et la tension dans les échanges.
Ces tensions n’apparaissent jamais par hasard. Elles s’enracinent dans des facteurs de risques psychosociaux bien connus : surcharge de travail, rôles mal définis, manque de reconnaissance. Les études sur les incivilités menées en France dessinent un panorama précis : certains secteurs, comme la santé ou l’accueil, cumulent les expositions. Mais aucun univers professionnel n’est vraiment à l’abri, que l’on évolue dans une PME ou une multinationale.
Pour décrypter ce phénomène, il ne suffit pas d’aligner les exemples de comportements déplacés. Procéder à une évaluation des risques s’avère nécessaire, notamment en s’appuyant sur le document unique d’évaluation des risques (DUER). Cela permet de repérer les zones à risque et d’objectiver les situations. Aujourd’hui, les risques psychosociaux (RPS) ne touchent plus uniquement la santé mentale : ils déstabilisent aussi la santé au travail, grignotent la performance, sapent l’engagement.
Pour anticiper, des outils éprouvés existent. La formation à la gestion des incivilités s’impose comme un levier solide pour redonner de l’air aux équipes confrontées à l’affaiblissement du collectif. Saisir ces signaux faibles, c’est déjà reconnaître que l’organisation porte une part non négligeable de la solution.
Quels signaux doivent alerter les managers de terrain face aux comportements inadaptés ?
Ce sont les managers de terrain qui, les premiers, repèrent les signes de tension. Bien loin des tableaux de bord généraux, ils lisent dans les détails : retards en hausse, absences qui se multiplient, arrêts maladie qui s’enchaînent. Les plaintes informelles ou les remarques persistantes sur la charge de travail méritent attention. Les conversations se raccourcissent, les échanges deviennent moins chaleureux. Les réunions s’allongent, lestées de non-dits qui s’accumulent.
Dans ces moments, la capacité à détecter les signaux faibles devient un atout décisif. Les incivilités selon l’INRS englobent tous ces comportements déplacés qui, sans aller jusqu’au harcèlement, dégradent le climat social et favorisent l’épuisement professionnel. La détérioration des relations de travail se lit aussi dans le décalage entre ce qui est attendu et ce qui se fait réellement : dès que l’équipe improvise pour éviter les tensions, c’est l’organisation qui vacille.
Voici quelques signes concrets qui doivent déclencher la vigilance :
- Diminution de l’entraide
- Baisse de l’engagement
- Montée du stress collectif
- Émergence de conflits ouverts ou larvés
Observer la santé physique et mentale des équipes, c’est aussi relever l’impact du stress sur la performance. Mesurer le stress au travail, à travers un test de mesure du stress ou une évaluation fine du climat collectif, permet de prendre du recul sur les dérives. Il ne faut pas négliger le fait que la frontière entre vie professionnelle et privée s’efface : quand les tensions débordent du travail, le bien-être s’effondre et la dynamique de groupe se grippe.
Des solutions concrètes pour protéger les équipes et instaurer un climat apaisé
Former, diagnostiquer, agir : une stratégie en trois temps
La gestion des incivilités ne se limite pas à rappeler quelques règles de politesse. Il faut aller plus loin : proposer une formation dédiée à la gestion des incivilités change la donne pour les managers de proximité. Bien accompagnés, ils identifient rapidement les situations à risque et désamorcent les tensions avant qu’elles ne s’enveniment. Les ateliers de gestion de conflits bousculent les habitudes, mettent les sujets sur la table, favorisent la prise de parole.
Pour bâtir une prévention solide, il s’agit de s’appuyer sur des bases robustes : diagnostic IPRP (intervenant en prévention des risques professionnels), baromètre régulier du climat social, analyse précise des facteurs de risques psychosociaux. Ce regard extérieur permet de mettre en lumière ce qui reste souvent invisible, de nommer les signaux faibles et de structurer la stratégie d’action.
Voici plusieurs axes à privilégier pour avancer concrètement :
- Renforcer la communication non violente : clarifier les attentes, poser des limites fermes. Un climat serein dépend de l’alignement entre discours et actes.
- Développer autonomie et reconnaissance : valoriser l’implication, soutenir les équipes sur la durée. Ceux qui affrontent les incivilités attendent des marges de manœuvre, de vrais outils, un management protecteur.
- Recourir à la médiation ou au coaching : désamorcer les tensions, restaurer la confiance, accompagner sur le long terme.
La prévention des risques psychosociaux ne relève pas du supplément d’âme. C’est un investissement durable dans la santé mentale et la qualité de vie au travail. Un climat serein ne surgit pas par hasard : il se construit, pas à pas, par la vigilance et des actes concrets. À chacun de choisir chaque jour d’entretenir cette dynamique, pour éviter que la lassitude ne s’installe là où l’énergie collective devrait circuler.
